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Et si c’était la dilution d’Israël qui était anticipée ?

Et si c’était la dilution d’Israël qui était anticipée ?

Le conflit israélo-palestinien est devenu l’angle mort de la communauté internationale. Comme un rituel que l’on observe mais décidés à ce qu’il ne trouble pas notre sommeil. On compte les morts avec un semblant d’indignation, on fait des déclarations empreintes de lassitude. Les images de roquettes, des bombardements tournent en boucle sur les chaînes de télévision et puis l’affaire très vite disparaît des écrans. As usual, dira-t-on. Les deux camps crient victoire. Gaza est exangue et le Quatar annonce l’envoi de fonds pour reconstruire le pays et céder de nouveau au rituel dans quelque mois. On passe très vite à la trappe le massacre de 254 Palestiniens et de 13 Israéliens lors du conflit de mai dernier.

Avant les accords d’Oslo il existait une intelligence politique du conflit, une volonté de mettre fin à un engrenage dont il apparaît clairement à toute personne dotée d’un peu bon sens que l’épilogue ne peut être que funeste et ravageur pour tous les acteurs. C’est après l’assassinat de Rabin que la situation a pris une tout autre dimension en se perdant dans les sables mouvants de la droite extrême et du nationalisme. Cet événement aurait pu tout au contraire servir d’électrochoc. Rendre plus lisible la position de Rabin et du philosophe Yeshayahou Leibowitch pour qui l’existence et la sécurité d’Israël sont suspendues à la création de deux États. C’est l’inverse qui a été entendu et Israël s’est enfoncé dans un délire identitaire porté par un rôle messianique. Parallèlement en Cisjordanie, l’autorité palestinienne s’est noyée dans la corruption en perdant toute forme d’autorité et de légitimité, pendant que le Hamas reléguait la cause palestinienne eu second plan pour se transformer en bras armé de l’Iran dans ses guerres extérieures. Le résultat ne peut être que catastrophique.

Du récit d’un conflit territorial que l’on tentait tant bien que mal de construire, ce conflit est devenu ouvertement celui des juifs et arabes, pire des juifs et musulmans. Les premiers gouvernants israéliens furent des équilibristes, ils ont réussi d’un côté à créer une véritable démocratie et de l’autre, chasser les Arabes de leur terre, priver les citoyens arabes israéliens de leurs droits. Des allers-retours permanents entre colonialisme et démocratie. En mettant son sort entre les mains de Netanyahou et de l’extrême droite Israël abandonnait toute forme d’équilibre et signait le début d’une lente descente aux enfers. On ne cache plus la volonté de construire le grand Israël. Une haine assumée qui ne repose plus sur le droit mais l’identité et le livre. Rien ne peut plus freiner l’escalade. Il n’existe plus aucune base objective pour trouver une solution négociée. On se perd dans le mensonge, la mauvaise foi, le faux-semblant. Les puissances occidentales après la chute de l’empire Ottoman avaient réussi après 1948 à faire de ce conflit une affaire de droit et possédaient les moyens d’imposer une solution géographique. Un compromis difficile mais mieux que rien. Le dernier conflit montre les ravages de cette politique expansionniste et sécuritaire. Malgré les milliards investis dans la sécurité par Israël et les États-Unis, jamais le pays n’a semblé aussi fragile face au Hamas et aux Palestiniens de nationalité israélienne qui refusent leur statut de seconde zone.

Comment peut-on imaginer l’évolution de la situation à terme ? C’est certainement Israël qui paiera le plus cher cette politique du pire en se diluant dans la région. Pourquoi ? Malgré l’appui massif des États-Unis, le pays ne pourra pas résister à une guerre permanente de plus en plus meurtrière pour les populations civiles. Son basculement dans les bras d’une extrême droite suicidaire va conduire la gestion du pays au désastre. La troisième raison est démographique. Si le pourcentage Palestiniens de nationalité israélienne est aujourd’hui de 20 % qu’en sera-t-il dans vingt ans alors que le taux de natalité est beaucoup élevé côté arabe ? Quant aux palestiniens ils risquent de tomber sous l’influence de celui qui de L’Iran ou de l’Arabie saoudite réussira à s’imposer dans la région en tuant tout espoir pour les jeunes Palestiniens de construire un état de droit.

Les États occidentaux ont-ils conscience de cette équation ? Est-ce la raison pour laquelle ils laissent glisser l’affaire doucement, sans faire de vagues, en laissant une jeunesse encore pleine d’espoir se heurter au mur du cynisme, du pouvoir et de l’identitaire. Est-ce la raison de cette omerta qui fait du terme même de « Palestine » un mot tabou, imprononçable sans être violemment agressé et mis au banc de la société. Est-ce la peur ? la mauvaise conscience persistante de n’avoir su s’opposer à l’envoi de six millions de juifs dans les camps de la mort ? la culpabilité d’avoir construit dans cet région un espace artificiel et invivable (Libanisation) ? la conscience de rater l’intégration pourtant possible d’Israël en pays hostile et de laisser le pays devenir ingouvernable ? Nous avons de lourdes responsabilités dans la construction de cette région, Pouvons-nous échapper aux conséquences de notre désastreuse politique de colonisation ? Comment aider les Palestiniens et les Israéliens à sortir de cette impasse.

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