« L’ art c’est un espace de liberté, à chacun de voir comment il veut l’utiliser. Moi je me sens proche du peuple, alors je ne conçois pas ma démarche sans prêter attention aux gens qui m’entourent et à ce qu’ils vivent.«
Qui est Ypsos?
Ypsos, bruxellois depuis 15 ans, né à Nevers est un rappeur qui fait des prods.
Je suis dans le Hip Hop depuis 2000 plus ou moins.
Tu es à l’origine du projet 40 MC’s contre la violence d’état. Peux-tu nous en parler ainsi que la genèse du projet et le choix des artistes?
Le morceau 40 MC’s contre la violence d’Etat, c’est en fait, un peu un accident. C’est parti du constat que malgré les nombreuses manifestations qui avaient lieu dans le monde, avant le covid, peu de rappeurs prenaient position.
J’ai posté sur les réseaux sociaux le morceau « 11’30 contre les lois racistes », réalisé par la crème du rap en France il y’a plus de 20 ans, en émettant l’idée qu’il serait intéressant de se repencher sur une démarche similaire, avec une autre approche.
À ma grande surprise, il y a eu de nombreuses réactions. J’ai donc débuté le projet avec les personnes ayant inter réagi au post. J’ai donc créé un planning, contacté les Mc’s, des beatmakers et programmé plusieurs séances de studio.
Penses-tu que les artistes ont un devoir de témoignage face aux événements sociaux, aux injustices ?
Je pense que les rappeurs et plus généralement les artistes n’ont aucun devoir. Ils sont libres de concevoir leur démarche comme ils l’entendent. L’ art c’est un espace de liberté, à chacun de voir comment il veut l’utiliser. Moi je me sens proche du peuple, alors je ne conçois pas ma démarche sans prêter attention aux gens qui m’entourent et à ce qu’ils vivent.
Comment est la politique en Belgique en ce moment ?
Je n’aime pas trop parler de politique, mais j’ai l’impression que le fossé entre les très riches et les très pauvres ne fait que s’agrandir. Je ne sais pas si c’est propre à la Belgique.
La politique, elle n’existe plus vraiment. C’est le capitalisme et le néolibéralisme qui règnent en maître. La politique, n’a plus rien du sens premier, elle se passe entre eux, les privilégiés. Parfois, il y a un gars de chez nous qui s’y glisse mais finalement, il est comme tout le monde, devant une énorme « kichta », il se tait.
Sur ta page Facebook tu partages beaucoup de clips rares.
Si tu devais nous faire une playlist Ypsos qui citerais-tu ?
Je poste certains morceaux rares comme tu dis, car en fait il y a pas mal d’artistes américains, français, belges ou suisses que j’écoutais, qui n’étaient relayés en France que par de sombres mix tapes.
A mes débuts, j’aimais bien toute la scène underground américaine. Des sons que tu retrouvais dans les mix tapes « Astro Bastards ». Je faisais des trucs bizarres (rire). Il y’avait des bayes que tu n’écoutais nulle part ailleurs, des Mister Lif, Camu Tao, Mf Doom, Company flow, Greedy Fingers (Grazzhoppa et Smimooz), Cage, etc. YouTube, c’était les Dj’s, les K7 c’était Spotify.
En français, je mettrais les classiques, Arsenik, 2 bal 2 neg, Sage Poètes, Expression Direct, Puzzle, Triptik, Movez Lang, D Abuz System, et des artistes plus underground, (sachant que même écouter du rap c’était underground), comme Aktivist, La Caution ou la compil’ Bastion. Les premières Mix tapes que j’ai eues dans les mains, c’est les Cut Killer, Paris – Banlieues-Provinces.

Tu es pluridisciplinaire ; tu dessines, écris, interprètes, tu produis tes instrus, comment articules-tu ces démarches?
Le beat making c’est un délire. Je ne comprends pas les beat makers qui font 5 prods par jour. C’est trop industriel à mon goût, à part quelques exceptions. Par contre, je suis admiratif. Je suis trop hyper actif pour rester devant un PC 15 heures par jour, il faudrait que je me remette à fumer 15 joints quotidiennement. Je compose pour mes potes et surtout pour moi, car j’ai commencé à faire des instrus pour la simple et bonne raison que peu de gens maîtrisaient les sampleurs. Il y a un moment dans certains morceaux de soul, de jazz ou peu importe, qui est magique. Et j’aime faire durer ce moment 3 min. Je suis attaché au sample. Les musiciens ont toujours samplé. Gainsbourg a repris des riffs de Hendrix, pourquoi pas nous ?
Tes textes sont très imagés, est-ce dû à l’influence du dessin ou bien à ta formation aux Beaux-Arts ?
On vit dans un monde d’images. Les images ont bercé notre enfance par les livres illustrés, par la poésie ou la vidéo. Cette réalité ne m’épargne pas. C’est plus simple parfois de faire passer une émotion avec un regard qu’avec mille mots. Nous, les paroliers, avons un travail ingrat c’est de raconter cet instant et pour ça les images sont nécessaires.
Un mot sur ton album French Melancholy.
Bon c’est l’instant promo (rire). Le dernier album en date s’appelle « French MELANCHOLY », album commun avec Smimooz, beatmaker insomniaque pour qui j’ai un profond respect.
Tu sors ton EP » l’Addition », qu’est ce que ça donne?
Le prochain EP qui arrive est en collaboration avec Carlsberg Slim. C’est mon premier EP en tant que beat maker exclusif et MC et ça s’appelle L’Addition !
Peace.
Facebook : Ypsos
