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Entre dépression et addiction, discussion avec Tuco Gadamn!

Entre dépression et addiction, discussion avec Tuco Gadamn!

La prestation de Stromae au 20h de TF1 a fait polémique. Chanter la dépression, en direct sur TF1 fut insupportable. Psychophobie pour certains, pudeur pour d’autres, pour avancer sur le sujet nous avons rencontré Tuco, anciennement Natty Boss. Lui, qui a connu le succès avant même sa puberté, a son mot à dire sur la question Gadamn!

Alors prenez part à notre discussion « dépression et addictions » avec Tuco Gadamn, anciennement Natty Boss, comédien et musicien depuis toujours… 

Tuco aka Nathanaël Beausivoir, parle facilement de son “état de surchauffe permanent”. Il reconnaît sans problème avoir vécu des périodes de dépression graves et être victime de plusieurs addictions. Forcément, ce fût le sujet de notre discussion avec Tuco, de nos réflexions entre dépression et addictions.

A croire que grandir dans un environnement artistique et musical fait plus rêver les wannabees que les concernés.

Une enfance sous les spotlight

Né en 1990, il grandit entouré de DJs et de MCs puisque sa mère “gérait le Blue Moon”: haut lieu HipHop/Reggae. Rapidement repéré par la clique de St Denis, il devient alors le “petit” de Joey Starr à 10 ans. Il apparaît régulièrement dans l’émission Sky BOSS sur Skyrock alors qu’il rentre tout juste au collège. 

Bref, une vie de rêves… qui s’avère bien moins pompedup qu’il n’y paraît.

Pris au piège du star système

Ce paradoxe le surprend encore. Comment peut-on valoriser autant la souffrance, la destruction ? Pourquoi ce mythe de l’artiste maudit qui se répand dans l’alcool et la défonce pour garder son image “hors norme”?

Lui qui a pourtant reçu “une bonne éducation”, d’une mère qu’il aime plus que lui-même, s’interroge sur son partage en vrille. Quand ça a commencé? Difficile à dire tant le sentiment “d’avoir toujours été la tête dans le guidon” est tenace. 

J’ai commencé à boire, à fumer, à avoir une vie sexuelle avant mes 13 ans. Comment te dire que j’étais bien trop jeune pour comprendre et pour ne pas tomber dedans”.

Tuco – janvier 2022

Le tout soutenu par un entourage qui trouve ça mignon… Le jeune Natty Boss fait les choux gras de ses aînés…

De cette vie faite de tournées, de drogue et de sexe, il garde un souvenir amer. Les opportunités perçues comme incroyables à l’époque deviennent, à l’âge adulte, de “véritables pièges”. Et c’est la dépression qui commence à pointer son nez.

Addict dès l’enfance

Le petit Natty est donc addict avant de le réaliser. Ça va très vite et tout l’y invite.

Le monde de la musique et du spectacle, c’est ça non ? Se droguer, être bizarre, faire le ouf…”

Tuco – janvier 2022

Le cerveau humain n’est pas encore fini à l’adolescence, il est en développement jusqu’à 16 ans et se stabilise jusqu’à 25. L’ingérence de ces produits s’inscrit donc profondément en chacun. Plus le produit sera consommé tôt, plus le risque addictif est grand. A bon entendeur…

Et ce, quelque soit le produit. Qu’il soit une drogue douce ou non (alcool et cannabis compris), classifié ou non comme “drogue” (sexe et sucre en faisant tout autant parti). En effet, tout produit consommé pour le pur plaisir, active le circuit de la récompense

Ce circuit participe de nos sensations de bien être. Il fonctionne quelque que soit le carburant. Il n’en reste pas moins qu’utiliser du diesel dans un moteur essence, ça finit toujours par l’abîmer….

Des addictions passées sous silence

L’addiction n’est donc pas un penchant naturel de certains, ni un gêne comme certains se plaisent à le dire, mais une vulnérabilité non prise en compte. Une façon de faire face à sa dépression et d’opposer du plaisir au mal être.

Nous pouvons tous devenir addicts.

Pire, n’avons nous pas tous une forme d’addiction ? Si l’addiction est une pathologie du lien pour Sibony, de la difficulté à être en relation avec ses pairs, d’un besoin de remplissage, d’existence pour autrui alors notre époque ne peut qu’en être friande. 

Addict à la télévision, addict au produiit, addict au boulotage, chacun son addiction mais tous addicts. C’est notamment ce que montrait très bien Requiem for a dream de Darren Aronofsky sorti en 2000.

En somme, laisser un enfant si jeune prendre des psychotropes, de l’alcool, avoir des relations sexuelles, c’est de la non assistance à personne en danger. Passer à côté de la détresse d’un enfant, c’est l’y condamner.

Une enfance en danger malgré le strass et les paillettes 

Le petit Natty est en donc danger. Non que ces adultes qui l’entourent soient des prédateurs (quoi que), mais il n’est qu’entouré d’adultes.

De fait, impossible d’être en lien avec lui-même, les préoccupations de son âge, les émerveillements et découvertes qui vont avec.

N’est-ce pas ce que Nathanael Beausivoir reproduit aussi dans le téléfilm La fugueuse de Jérôme Cornuau diffusé fin 2021 sur TF1 ?

Quand un enfant n’est pas respecté dans ses besoins que ce soit par malveillance, par carence ou par néglience, c’est donc bien de la maltraitance. Par conséquent, l’image de soi de l’enfant est dégradée et la dépression fait son apparition.

Le non respect des besoins de l’enfant

Les enfants ont des besoins auxquels ils ne peuvent subvenir par eux-mêmes et dont la satisfaction revient aux adultes.

C’est donc bien leur responsabilité. Ils ont des besoins génériques (de leur âge), spécifiques (leur situation particulière), particuliers (leur personnalité). 

Ici, son besoin générique a 10 ans est d’abord plus de faire du vélo avec ses potes que de “préparer les sélections pour les grands DJ de la région parisienne”.

Ensuite, son besoin spécifique est d’avoir un référent masculin digne de ce nom. Un exemple (et non un modèle) de ce qu’est être homme… Mais, “avoir Joey et Seb (Farran) comme référent masculin, comme tuteur, c’était à la fois formidable et pas toujours simple pour se construire”.

Enfin, son besoin particulier était donc de trouver son équilibre entre sa passion musicale et le monde d’enfant nécessaire à son développement.

Une conception toxique de la masculinité

Néanmoins, comme beaucoup d’hommes, ses modèles considèrent la virilité comme le seul élément à transmettre. Cette virilité entendue comme le fait de posséder les femmes, toutes de préférence, d’être puissant financièrement, socialement, etc. Elle participe de la dépression puisqu’elle fait peser sur les épaules masculines une pression quasi impossible à atteindre.

Cette conception de la virilité sert aussi plus le capitalisme, l’indivdiualisme et la compétition que les hommes eux-mêmes, n’est pas sans laisser des traces sur l’humanité entière

Dès ses 12 ans, il “gagne sa vie”. Alors comment respecter l’autorité quand c’est vous qui la faites ? Comment se sentir enfant quand vous avez déjà des préoccupations d’adultes (et des banquiers, des managers, des fans) ? Comment être soi et non une image, une caricature de soi-même?

Troisième élément de négligence donc : n’est-ce pas un peu trop pour un enfant ?

Une surexposition dangereuse

Ainsi, en 2004, tout le monde connaît sa tête, sa voix (avant qu’elle mue), son équipe, son pédigrée. A14 ans, c’est pourtant encore un enfant. Il n’est pourtant pas encore en capacité d’intégrer quelque chose de l’altérité. 

L’autre est alors un moyen d’arriver à ses fins, il n’est pas une personne. Ce n’est qu’à partir de la fin d’adolescence que la question de l’altérité s’intègre réellement. 

Les rapports sexuelles avant 15/16 ans sont donc de potentielles agressions et ce, quelque soit le genre. 

De la starification à l’addiction … 

En somme, il passe à travers les mailles du filet de la protection de l’enfance. Non qu’il cache ses souffrances, exposées au grand jour, mais parce qu’il semble tout à fait intégré au star système jamais perçu comme un problème… Une dépression maquillée par les spotlights de sa vie ?

Et c’est là que la situation s’aggrave. En effet, un mal être non reconnu par les adultes, pousse chacun d’entre nous à trouver des substituts.

Tuco et Stromae se rejoignent donc sur la folie du monde et du show bizness que le strass et les paillettes ne maquillent en rien. Pire, ce monde de paraître et de starification favorise la dépression.

Que certains trouvent exécutoire dans le xanax, la codé ou l’alcool, c’est toujours notre vulnérabilité qu’elle indique.

Avoir l’argent et le succès ne rend pas plus heureux, loin de là. Ce monde de compétition, de rivalité, de manque d’empathie et de bienveillance rend malade et ne mérite donc pas autant de fantasmes. 

Plus nous avançons dans la discussion, plus le lien entre dépression et addictions apparaît évident, non, Tuco?

Son dernier projet : Gadville est à se procurer de toutes urgences et disponible sur toute les plateformes de téléchargement. 

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