Pseudo de Jérémy Rubenstein, historien, chroniqueur et écrivain (pas forcément…
Chronique d’Urnes « La triangulation des porcs »
La candidature de Zemmour obsède ce début de Campagne Présidentielle 2022 (à ne pas confondre avec les JO 2024 malgré les acrobaties les plus osées qui s’y donnent à voir). Mais personne ne remarque que cette candidature serait impossible sans l’accord, au moins tacite, de son patron : Vincent Bolloré. Les intérêts de ce dernier éclairent pourtant ce qui se passe à la droite de la droite.
Bolloré est l’un des rares milliardaires bretons à n’avoir pas fait fortune dans l’industrie du porc. Il a cependant retrouvé la filière porcine à travers son groupe médiatique. Du moins, le bruit et l’odeur émanant de CNews sont d’une confondante similitude avec les effluves et grognements se répandant aux abords d’une porcherie industrielle. Son élevage comporte quelques vedettes pressenties pour remporter une médaille au Concours général du Porc. En haut du podium, Zemmour bien sûr, dont la candidature semble acquise.
Dès lors, la candidate naturelle du “Parti des Porcs” (p’tit nom offert par NTM), Marine Le Pen, se trouve dangereusement concurrencée. Les couinements au salon du RN ce week-end (appelé “Conseil National”) témoignent de la fébrilité que provoque la star de CNews. Et pour cause, que 5% de l’électorat du groin national opte pour le polémiste raciste, et le passage au second tour de Le Pen serait compromis.
Mais est-ce une si mauvaise affaire pour l’extrême-droite que plusieurs de ses têtes d’affiche s’écharpent ? Dans la configuration actuelle des médias, cette concurrence entretient une dynamique qui empêche tout thème social d’émerger. Voilà qui convient à Bolloré.
Sans compter qu’il existe un autre sérieux candidat à la cochonnaille suprême. Celui-ci peut revendiquer des ratonades d’exilés en plein cœur de Paris, l’interdiction de donner à manger aux mêmes, tabasser, éborgner, mutiler des opposants politiques, tout en favorisant la croissance exponentielle des plus grandes fortunes. Voilà un passif qui n’a rien de “mou” à brandir dans le concours porcin. Ce candidat de l’extrême-droite implicite est, bien sûr, Emmanuel Macron. Face aux promesses de ses concurrents de promouvoir un État policier, lui peut afficher des résultats probants dans le même sens.
Côté LREM, la candidature du troisième cochon, Zemmour donc, est reçue avec des grognements de satisfaction. Car, pour Macron, le problème n’est pas tant le second tour que de franchir le premier, quoiqu’en dise la propagande sondagière (à la “marge d’erreur” dépassant désormais les 10 %). Or, Zemmour a la particularité de rassembler de potentiels électeurs autant de la droite “classique” que “porcine” (LR et RN). Aussi, en égalisant par le bas ces deux concurrents, il favorise le passage de Macron au second tour. Voilà la triangulation des porcs.
Réduction des inégalités, crimes policiers, justice fiscale, outils industriels écologiques, dignité de la France (offrir l’hospitalité aux exilés), voilà autant de sujets qui paraitront incongrus durant cette campagne. Dans ce sens, monsieur Bolloré a déjà gagné. Sa fortune ne sera pas remise en cause, pas plus que ses moyens de l’accroitre (saccage de l’Afrique, management par la terreur, hystérisation des “débats” et fake-news dans ses médias, etc.). Zemmour, Le Pen, Macron, c’est le tiercé gagnant de Bolloré.
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Notes & Références
- NTM fait le point sur le “Parti des Porcs” en 1995 (album Paris Sous les Bombes) :
- Ratonnade à Paris dans la nuit du 23 au 24 novembre 2020
- Interdiction de donner à manger aux exilés :
Interdiction renouvelée chaque mois :
- Progression des plus grandes fortunes françaises
https://www.challenges.fr/classements/fortune/
- Sondage en Occitanie, une semaine avant les élections régionale (13 juin 2021) qui donne le RN à 31% devant le PS (29%). Dans les urnes, le PS est arrivé en tête avec 39,57% contre 22,61% pour l’extrême-droite. Faut-il parler de 10% de marge d’erreur ou de 20%, puisque les sondeurs se “trompent” deux fois à hauteur de 10% ?
- Le saccage de l’Afrique par monsieur Bolloré est à la source d’environ 80% de sa fortune (estimée cette année à 7 milliards d’euros). À travers la cascade de sous-traitances, les travailleurs des plantations de palme exploitées par monsieur Bolloré sont payés, au mieux, 53 euros par mois (chiffre de 2009). Il faudrait donc qu’un travailleur de monsieur Bolloré travaille 132 075 471 mois (11 006 289 années, plus de 11 millions d’années, soit à peu près le temps qui nous sépare de l’apparition des premiers bipèdes) sans dépenser (manger) pour atteindre la fortune de son patron. Si les Africains épargnent un peu, il est donc certain que l’action de monsieur Bolloré en Afrique favorisera le développement économique du continent (avec un peu de patience et s’il reste encore des ressources à exploiter), si bien que monsieur Zemmour n’aura plus à s’inquiéter de l’afflux migratoire.
https://www.monde-diplomatique.fr/2021/01/PIGEAUD/62633
https://www.lesechos.fr/2013/02/la-machine-afrique-de-bollore-1096656