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Une question de limites avec Berst artiste graffiti à Auckland.

Une question de limites avec Berst artiste graffiti à Auckland.

D’origine chinoise, le graffiti artiste Berst peint depuis vingt ans en Nouvelle-Zélande, et comme on aime l’exotisme on est parti en savoir plus sur comment le writing pouvait être sur cette île de l’océan pacifique. Il partage avec nous sa vison de la lettre et comment elles questionnent les limites. Le tour du monde de Lady K continue.

Bonjour Berst d’où viens-tu ?
Je suis né à Hong Kong, mais j’ai été éduqué à Auckland, en Nouvelle -Zélande.

Quel âge as-tu ?
J’ai 34 ans.

Depuis combien de temps peins-tu ?
J’ai commencé à peindre du graffiti en 2001. Les premières années c’était
uniquement du tag et de la bombe mais je dirais qu’officiellement j’ai
commencé à peindre des œuvres en 2005-2006.

Pourquoi as-tu choisi Berst et qu’est- ce que cela signifie ?
Berst est le premier alias que j’ai utilisé dans la rue lorsque j’ai commencé à
peindre. Il n’y pas de raison quelconque à pourquoi ce nom plutôt qu’un autre
mis appart le fait que j’aime le mouvement dans les lettres et la combinaison
de la structure des lettres. J’ai eu plusieurs d’alias que j’ai utilisé pendant des
années mais Berst semble être celui qui soit resté le plus longtemps.

Quel est ton crew et que cela signifie t-il ? Depuis quand existe-t-il ?
Je fais parti de deux crew : GBAK et TMD. GBAK provient de deux crew
différents à Auckland (GB et AK). Après plusieurs nuits passées à peindre
ensemble en tant que deux crew séparés nous avons peint une production
ensemble et avons décidé de fusionner les crew ensemble pour former GBAK. Cela a créer une camaraderie entre des jeunes groupes de cultures et origines diverses. Cela nous a encouragé à construire quelque chose qui était encore plus grand que chacun d’entre nous. Nous avons à ce jour des membres habitant la Nouvelle-Zélande, l’Australie ainsi qu’en Europe. TMD s’était formé bien plus tôt en 1997 et comporte beaucoup plus de membres. Il y a une génération de writers datant d’avant donc j’estime être chanceux de faire partir de ce crew également.

Pourquoi choisir le writing ?
Il existe plusieurs raisons à cela mais la créativité en fait partie. Plus jeune je n’étais pas particulièrement fort pour les choses scolaires ou le sport . Par ailleurs, je ne me sentais pas vraiment connecté à ma culture chinoise et je me sentais disloqué au niveau culturel en Nouvelle-Zélande. Le Graffiti m’a donné une voix visuelle pour m’exprimer et je sens que je pourrais appartenir à quelque chose avec mes amis. Depuis le début j’ai toujours apprécié le côté aventurier du graffiti comme lorsqu’on découvre un endroit inconnu, entrains de faire quelque chose que l’on ne devrait pas. A présent il est plus une question de dépasser les limites de ce que peut-être le graffiti en Nouvelle-Zélande.

As-tu dessiné avant de commencer à écrire ou peindre?
J’ai étudié l’art au lycée mais mes traits n’étaient pas raffinés. Je ne pense toujours pas que le dessin me vient naturellement mais cela est du au fait que j’ai une mauvaise mémoire et un sens moyen d’observation. Si je m’entraîne à dessiner quelque chose cent fois j’y arriverai. Pendant un moment, je peignais tellement que le dessin arrivait sur le mur quand je faisais du freestyle. Maintenant, j’essaye d’avoir une idée avant de m’approcher du mur, sinon je reproduirai la même chose que ma dernière pièce.

Peux-tu nous expliquer comment tu as commencé ?
Je m’intégrais bien au cercle d’amis. Au début je n’étais pas tant attiré par le graffiti car je ne le comprenais pas. Après avoir posé quelques tags et un peu de reconnaissance j’ai pris goût. Dans la rue c’était les tags qui dominaient mais lorsque j’ai découvert les voies ferrées, j’ai vu tellement de brûlures, ça m’a époustouflé. Je n’arrivais pas à comprendre comment les gens pouvaient faire des choses aussi incroyables de manière autant illégale. A cette période internet était devenu accessible plus facilement et je commençais à voir des brûlures à l’étranger. Voir ce gendre d’œuvre m’a permis de voir ce qui était de l’ordre du possible.

Quelle est ton inspiration ?
Quand j’ai commencé c’était uniquement du graffiti et je n’avais pas une ouverture d’esprit. Aujourd’hui je regarde toujours du graffiti mais je m’inspire également des dessins animés, de bd, d’architecture, de textiles, ce que vous voulez.

Que recherches-tu quand tu crées des lettres ?
Je cherche à être un writer au style équilibré et je pense qu’il faut savoir toucher à tout. Cela veut dire de pouvoir peindre n’importe quel style en fonction du contexte et de la situation. Faire un wild style sur une autoroute a ses mérites, mais un blockletters serait peut -être quelque chose de plus lisible esthétiquement. Si vous ne savez que faire un wild style mais pas de throw-up ça va être compliqué car les éléments simples complètent les éléments complexes mais ce n’est pas une règle d’or.

Quelle est ta conception des couleurs ?
J’ai plusieurs stratégies différentes pour la couleur. Les plus évidentes sont le chrome et le noir, des remplissages à couleur unique, des négatifs, et des remplissages à trois couleurs. Mes pièces les plus colorées sont plus complexes et incluent un peu plus de recherches et de freestyling. Parfois j’utilise 3 ou 4 couleurs différentes mais j’applique des tonalités de couleurs du plus clair au plus foncé, ou j’apporte soixante bombes de peinture et je vois ce que je crée. J’utilise la même bombe de peinture parfois pendant 3 minutes, puis je change, ou j’isole les couleurs en tant que lettres individuelles ou de manière horizontale. Il existe beaucoup de manières de sortir de sa zone de confort.

Qu’est-ce qu’un bon lettrage à tes yeux ?
Les lettres qui ont du flow, de l’espace, de la consistance, du caractère, de la lisibilité et du funk. Il y a beaucoup de personnes qui apportent des nouveaux aspects esthétiques dans le lettrage donc je ne suis pas si sûr que tous ces critères correspondent entièrement.

Tu peins des toiles, des murs, des trains, que préfères-tu ?
Je préfère les trains de marchandises car ils traversent le pays. C’est l’opportunité parfaite pour faire voyager ton travail jusqu’à une autre ville, sans parler du fait qu’il reste longtemps visible. Les murs sont idéals pour s’entraîner mais on peut vite s’en lasser s’il n’y a pas une aventure pour y accéder et que c’est ton mur légal du quotidien.

Peux-tu nous indiquer quand et comment le writing est arrivé dans ta ville ?
C’est une très bonne question mais je ne connais pas la réponse à 100 pourcent. Je sais néanmoins que le premier crew s’appelait Smooth pendant les années 1980 Ce crew figurait même dans un livre intitulé Spray Can art qui regroupait tout le graffiti à travers le monde. Lorsque j’ai commencé à peindre au début des années 2000 il y avait déjà deux à trois générations qui me précédaient. Vers la fin des années 90 les gens avaient commencé à peindre des pièces et je dirais que les invités internationaux que l’on recevait ont eu un très grand impact en influençant la scène. Il y a avait Bates, Can2, Atom, Wow123, Ewok, Totem et Loomit. Je pense que ces writers ont énormément influencés les autres writers du moins dans l’Auckland.

Comment les autorités et les gens perçoivent-ils le writing dans ta ville ?
Pendant longtemps les gens percevaient le graffiti comme un problème social
lié à la jeunesse. Pendant un temps, Auckland était lourdement taggué et passé à la bombe. L’attitude était longtemps négative, cependant depuis 5 ans cela est perçu de
manière plus positive due à l’association étroite avec le street-art. Le street-art reste la manière artistique de s’exprimer préférée dans la rue par la communauté mais je pense que les gens s’ouvrent de plus en plus vis à vie du graffiti de nos jours. Par contre si tu te fais attraper par la police il est fort probable que vous serez condamné pour dégradation de biens publique. Il y a 10 ans la police vous laissait partir car elle s’en fichait et les formalités les encombrer.

Comment expliques-tu que le writing ne soit pas aussi populaire que le
street-art ?

Tout dépend de l’esthétique, de l’intention et du contexte. N’importe quoi qui est fait dans un endroit public va créer un ressenti différent chez chacun. On peut se sentir confronté par quelque chose car nous sommes pas familiarisé avec la chose. Quelqu’un qui fait un wild style sur un mur il se peut que ça ne plaise pas car la personne ne le comprend pas alors que si on dessinait des fleurs certaines personnes vont trouver ça magnifique. S’agissant du contexte, les gens vont voir du graffiti dans la rue et ne pas l’accepté alors que si le graffiti se trouve dans une galerie, il serait de suite accepté.

En même temps, écrire votre nom ne représente rien pour qui que ce soit appart ceux qui sont dans le milieu et vous-même, alors que peindre une toile traverse le langage écrit, et les gens peuvent tenter d’imaginer ce que l’œuvre pourrait représenter. D’après moi le street-art se rapproche des notions traditionnelles dans l’art alors que le graffiti peut être vu comme quelque chose de négatif et ou positif.

Penses-tu que le graffiti est une forme de peinture en action qui représente
la démocratie sachant que tout le monde peut intervenir dans l’espace public
et modifier ce qu’il veut ?

Absolument, c’est une des raisons pour laquelle je suis impliqué dans le graffiti, j’aime challenger ce que l’espace public devrait être, quelle apparence il doit avoir, et donné une nouvelle touche en ajoutant quelque chose de nouveau. Je n’ai pas besoin d’avoir l’aval de qui que ce soit, je n’ai besoin de personne pour organiser ce qui devrait aller à tel endroit. J’aime voir les artistes sortir des règles du système et cela sans que cela ne se limite uniquement au graffiti. Je tire mon chapeau à n’importe quel artiste qui dépasse les limites d’interventions et de perturbations dans l’espace public.

As-tu des projets actuellement ?
J’ai beaucoup de buts que j’aimerai atteindre en 2020. Une de mes priorités étant de travailler rigoureusement sur l’enregistrement de mes épisodes pour ma série REAL TIME WEB qui partage les histoires de writers en Nouvelle-Zélande. J’ai realisé 15 épisodes jusqu’à présent et je compte en faire 100 mais cela me demande beaucoup de temps et d’énergie. Je pense que partager et apprendre sur notre histoire fera de nous de meilleurs writers et avancer dans la bonne direction. Sans connaître son histoire, les nouveaux writers seront ignorants à propos de la scène du graffiti et débuteront à zéro.

As-tu un mot pour la fin ?
A tous les writers présents, n’ayez pas peur d’élever le graffiti vers de nouveaux sommets et de nouvelles directions. En peignant de manière assidue n’oubliez pas de partager votre savoir. Vous êtes tout aussi important et influent que l’héritage que vous laissez derrière vous afin d’influencer la prochaine génération.

Propos receuillis par Lady. K

Traduit par Vanessa Bedas

Plus de photos : https://www.instagram.com/berst_1/?hl=de

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