Ça s’est passé cette après midi à 19h…

Il est bien connu que la force politique des états libéraux n’est pas la censure mais, tout au contraire, une liberté de dire sans conséquence. “La dictature, c’est ‘ferme ta gueule’, la démocratie c’est ‘cause toujours’” résume l’adage. Signe manifeste à la fois d’un changement progressif de régime et de la faiblesse du pouvoir en place, la liberté d’expression y toujours plus réprimée. LBD, gaz, prison, garde-à-vue, tribunal, amendes à la pelle, sont devenues les réponses courantes de l’État aux personnes qui disent ce qui lui déplait.
Aujourd’hui, c’est une partie de l’équipe de HIYA! qui a été embarquée. Pourquoi ?
Parce qu’elle s’exprimait et que le message n’est pas précisément le vide divertissant du trio comique Carlito-McFly-Macron. La liberté d’expression s’arrête là où la politique commence. Or, HIYA! n’est pas venu orner les discours des pouvoirs en place pour leur donner une touche sympathique, les graffeurs sont venus chroniquer sur nos murs ce qui se passe dans nos rues, ici et à Gaza.
Car la répression, si elle est d’une intensité incomparable, n’en reste pas moins la répression. De même que la liberté, qu’elle s’exprime dans la rébellion en Colombie, dans les urnes au Chili, dans un petit voilier zapatiste qui vogue à la découverte de l’Europe, ou dans la peinture de nos bombes, c’est toujours la liberté. Blanc, noir. Les nuances existent, elles sont partout signe d’une vitalité à laquelle il ne faut surtout jamais renoncer, mais la répression est blanche et la rébellion est noire. Blanches les voitures de police qui ont embarqué nos artistes. Noires les lignes tracées sur nos murs.
Blacklines donc, collectif d’artistes qui accompagne les mouvements de protestation qui partout surgissent. En trois ans d’existence, ses 300 artistes n’ont pas chômé, à l’écoute de la tectonique sociale qui fissure ce pays et le monde, ouvrant une brèche dans laquelle apparaît une autre vie possible contre l’ordre mortifère.
Aujourd’hui, les gardiens de cet ordre sont venus interrompre Blacklines et, pour la première fois, les ont embarqué au commissariat.
Leur crime ? Chroniquer sur un mur déjà totalement graffé, dans le 13ème Art. de Paris. Peu importe que le mur appartienne déjà de fait aux artistes, que la ville dit s’enorgueillir de son street art qu’elle cherche à monnayer. Peu importe l’absurde. Ou oui, justement, le pouvoir doit être absurde pour bien affirmer son arbitraire. Alors, nos artistes ont perdu leur soirée au poste, et leurs œuvres restent in-finies, en cours, comme la rébellion.
