Pseudo de Jérémy Rubenstein, historien, chroniqueur et écrivain (pas forcément…
Le nouveau quinquennat commence sur les chapeaux de roues, avec deux personnes tuées par un policier alors que les macronistes faisaient encore péter le champagne. Celui-ci risque cependant vite de leur rester en travers de la gorge. Si les législatives en juin n’apportent pas une armée de bots à l’Assemblée. Et que le Parlement soit à l’image des électeurs: tripolaire, dont deux pôles opposés à Macron.
Bon, les Présidentielles ont bien eu lieu. C’était saoulant, merci. Franchement, quand un film est mauvais, en faire un remake, c’est abusé. Les rares moments de saisissement, genre « attention ! les sondages annoncent que les candidats sont dans la marge d’erreur », donnent une sensation de déjà-vu. On n’y croit plus trop. L’effet est émoussé. On s’oblige à s’affoler un peu quand même, en projetant une Le Pen au pouvoir. Le film d’horreur. On frissonne en imaginant les flics déchainés. Puis on pense qu’ils le sont déjà. Ça serait pire ? Oui, ça serait pire.
Navet 2, le remake du premier
Alors on regarde le remake d’un film dont l’original était déjà bidon. Navet 2. Ça commence par un flic justement, qui défonce une bagnole au fusil d’assaut. Sur le Pont-Neuf, en plein cœur de Paris. Deux morts, un blessé. On entend en boucle que la bagnole fonçait droit sur les flics. On n’en croit pas un mot. Ç’eut été pire ? Oui, ç’eut été. Imagine, le syndicat Alliance aurait gouverné !
Alors, on continue à mater Navet 2. Oh ! « Ouverture d’enquête pour homicide volontaire ». Surprise : un magistrat a trouvé bizarre que le flic ait visé les têtes des passagers et non les roues du véhicule. Et on ne sait plus si ce dernier allait droit sur les flics ou s’il prenait la fuite. Mais peu importe ce « détail » pour Alliance qui crie : « présomption de légitime défense ». Mais, heu, Alliance, c’était pas le syndicat qui était censé gouverner seulement si c’était l’autre qui gagnait ? T’inquiète : ç’eut été pire.
Et, du coup, Poutou a toujours tort en affirmant l’évidence « la police tue » ? On s’attend à le voir inviter sur tous les plateaux de télé, désormais reçu comme spécialiste des questions policières. Ha, bah, non. A la place, c’est Alliance-Putschiste qui appelle à manifester lundi.

L’armée des bots
Ok. Alors c’est quoi la suite ? Ha oui, l’armée des bots. Vous vous souvenez : après le couronnement de Macron, il y a l’élection des Playmobiles. L’armée des bots qui occupent l’Assemblée avec leurs messages préenregistrés. C’est pour le schéma démocratique, il faut respecter des règles. 1. McKinsey écrit la loi. 2. Le cabinet de conseil la remet au ministre. 3. Le ministre la présente aux bots. 4. Les bots la votent. C’est simple et efficace. La seule difficulté technique réside en la capacité des bots à ne pas se tromper de bouton. Les députés macronistes devraient bientôt changer les boitiers afin de mettre des couleurs, trop difficile à s’y retrouver sinon. C’est compliqué la vie de bot.

À propos de complication : que se passerait-il si l’armée de bot n’était pas reconduite dans la foulée de leur chef suprême ? Après tout, il n’est pas impossible que les électeurs préfèrent avoir des députés. On peut même imaginer une chose inouïe: des députés contre Macron en proportion à peu près égale aux électeurs détestant Macron et son monde. Soit, environ 70% de l’électorat et 85% de la population (selon mon estimation, au moins aussi fiable que n’importe quel sondage).
Une cohabitation?
Qu’aurions nous ? Mélenchon premier Ministre ? Dans le cas improbable d’une majorité absolue de l’Union Populaire, ce ne serait constitutionnellement pas impossible. Certes, le président choisit le chef de gouvernement mais en fonction de la majorité de l’Assemblée. Si celle-ci est d’un parti adverse, il y a cohabitation. Plusieurs précédents : Mitterrand-Chicac (1986-1988), Mitterrand-Balladur (1993-1995) puis Chirac-Jospin (1997-2002).
Mais à l’époque de ces cohabitations, il y avait deux partis dominants (PS et RPR), si bien que le président était d’un parti et le Parlement de l’autre. Or aujourd’hui il y a trois pôles électoraux : gauche, droite et extrême-droite. Si bien qu’il est possible qu’il n’y ait qu’une majorité relative (et non pas absolue, comme l’armée de bots durant Navet 1).
Le système tripolaire: un véritable régime parlementaire ?
Résultat ? On n’en sait rien avant les élections en juin. Mais dans le cas d’une répartition tripolaire de l’Assemblée, le film pourrait devenir nettement moins monotone. Le plus drôle étant que ce serait souvent des petits partis qui seraient en mesure de renverser une majorité, par jeu de bascule. Genre, Jean Lassalle qui fout le oaï. Bref, on retrouverait un régime parlementaire, ce qui nous changerait un peu de la monarchie.
Et, last but not least, quelque soit la majorité relative, elle aurait bien du mal à brandir le 49.3 (procédure pour faire adopter une loi sans vote). En effet, celle-ci prévoit la possibilité d’une « motion de censure ». C’est-à-dire que l’Assemblée peut renverser le gouvernement à l’occasion d’un 49.3. Or, en cas de répartition tripolaire, aucun gouvernement ne s’y risquerait. Bye-bye « réforme » (saccage, en bon français) des retraites (dont les caisses se portent bien, quoiqu’en dise la propagande macroniste).
Réforme des retraites : Bruno Le Maire ne "peut pas donner la garantie" qu'il n'y aura pas de 49/3 sur la question. pic.twitter.com/TKQWOtba4d
— franceinfo (@franceinfo) April 25, 2022